Vetropack envisage de fermer le seul site helvétique où l’on récupère des tessons pour en faire de nouvelles bouteilles. Un recyclage qui s’effectuerait à l’étranger si le projet aboutissait
Vetropack, qui a indiqué début mars envisager la fermeture de son usine historique de Saint-Prex (VD), a annoncé ses résultats mardi. Le fabricant suisse d’emballages en verre a publié un bénéfice en hausse en 2023, à 63,3 millions de francs.
Le groupe confirme examiner l’éventualité d’une fermeture de son site vaudois, peut-être dès le second semestre de cette année, et qu’une procédure de consultation a été lancée. «Quelle qu’en soit l’issue, nous entendons poursuivre notre engagement dans le domaine du recyclage du verre avec nos partenaires suisses au niveau des communes», affirme la firme dans un communiqué.
### Rôle central
La Suisse serait un bon élève en la matière, avec des taux de recyclage supérieurs à 95% cette dernière décennie. Vetropack joue un rôle central: la plupart des tessons de bouteilles en verre qui sont récupérés et destinés à être utilisés dans la fabrication de nouvelles bouteilles en Suisse romande transitent par Saint-Prex, où se trouve l’unique verrerie du pays. Les autres tessons sont soit recyclés à l’étranger, soit utilisés dans la fabrication de mousse isolante ou de filtres pour piscines.
Deux autres usines en Suisse récupèrent en effet le verre usagé: celle de Misapor, une société grisonne qui produit notamment, avec du verre, des isolations thermiques, des remblais ou des constructions routières. Le groupe soleurois Dryden Aqua se spécialise quant à lui dans la fabrication de filtres pour le traitement de l’eau à partir de verres usagés. Toutefois, en quantité, le verre, qu’il soit vert, blanc ou marron, est surtout destiné à la fabrication d’emballages, des bocaux aux bouteilles. Et plus de la moitié de ces déchets est déjà recyclée à l’étranger.
En 2021 par exemple, 379 144 tonnes de verres ont été collectées (dont 314 060 tonnes d’emballages de boissons) et 53% de ces matières premières secondaires ont été recyclées à l’étranger, selon l’Office fédéral de l’environnement (OFEV).
Par année, 90 000 tonnes de verres usagés passent par Saint-Prex. Une fermeture du site engendrerait des transports plus longs pour ces matériaux, vers des usines du groupe en Autriche, en Croatie ou en République tchèque, selon Vetropack.
Ce transport aurait un coût, notamment écologique car le verre pèse lourd (plus que le plastique par exemple), mais ce matériel recyclé est prisé: «S’il est vrai que le coût du verre usagé n’est pas beaucoup plus bas que celui des matières premières primaires utilisées pour la production de verre, la fonte des tessons requiert 25% moins d’énergie», indique Vetroswiss [sur son site](https://www.vetroswiss.ch/fr/le-recyclage-du-verre/les-chemins-empruntes-par-le-verre-usage/). Cette organisation a été mandatée par l’OFEV pour superviser le financement du recyclage du verre en Suisse et sensibiliser la population à la question.
Si vous achetez de grandes quantités de bouteilles en verre, vous recevrez une facture de Vetroswiss. Selon le principe du pollueur-payeur, chaque bouteille (à partir d’une capacité de 0,09 litre) est taxée, de 2 à 6 centimes selon la taille. Cette «taxe d’élimination anticipée sur les emballages en verre pour boissons» (TEA), qui ne porte pas sur les denrées alimentaires, permet à Vetroswiss de recueillir entre 30 et 35 millions de francs par an. La majorité est reversée aux communes, qui ensuite paient des sociétés, comme Serbeco, Retripa ou Papirec, pour le transport. Le tri est surtout fait chez Vetropack.
### Réutilisation et consignes
Des entreprises, comme le brasseur Docteur Gab’s, veulent collecter sans consigne, sur une base volontaire – une solution plus écologique. Des initiatives vaudoises, comme [Au REverre](https://aureverre.ch/projet-pilote/ca-vaud-lretour/), [Réseau Consignes](https://www.reseauconsignes.ch/) ou [Bottle Back](https://bottleback.ch/), ont fait des tests en ce sens.
«La réutilisation serait facilitée si les formats de bouteille étaient standardisés et si les étiquettes s’enlevaient facilement au lavage, comme avant», estime Jasmine Voide, responsable des projets d’économie circulaire chez Swiss Recycle, une association dont Vetroswiss est membre. Dans les pays voisins, des projets de consigne se développent. En Autriche, 10% du commerce de détail avec du verre doit être «consignable», selon une récente loi.
En Suisse, la collecte de verre a commencé dans les années 1970, avec Vetropack. La crise du pétrole incitait alors à une utilisation de ces matières qui permettait aux verreries d’utiliser moins d’énergie. La collecte était communale et financée par Vetropack, qui disposait de trois verreries en Suisse (à Saint-Prex, Bülach et Wauwil). En 2000, elle a été rendue obligatoire. Pour conserver une industrie du recyclage du verre en Suisse et renforcer la réutilisation, il faudrait augmenter la TEA, estiment plusieurs sources dans l’industrie.